La subjectivité : atout ou obstacle ? Le défi des sciences du sport et du corps.
Cette nouvelle série de podcasts fait suite à la troisième édition des journées d’études jeunes-chercheurs du laboratoire C3S organisée en octobre 2024 à Besançon. Celle-ci questionnait la subjectivité en jeu au cours d’une recherche. Si l’article L211-2 du code de la recherche impose aux chercheurs de « garantir l’impartialité des recherches et l’objectivité de leurs résultats », comment le jeune chercheur doit-il gérer le rapport entre objectivité et subjectivité ? L’un est-il l’obstacle de l’autre ou peuvent-ils devenir complémentaires ? Si, de prime abord, la subjectivité peut nuire à cet objectif, ne pourrait-elle pas devenir un atout pour tendre vers une recherche impartiale ? S’agit-il de s’affranchir de toute forme d’engagement émotionnel ou bien de s’en saisir afin d’explorer de manière sensible et subjective les secrets et la complexité du terrain enquêté ? Si la place à accorder à la subjectivité semble varier selon les traditions disciplinaires et théoriques, elle demeure un enjeu central auquel tout apprenti chercheur est confronté. Cet appel à communication entend ainsi explorer la manière dont les jeunes chercheurs s’en emparent.
Annabelle Caprais
Annabelle Caprais est Maîtresse de Conférences associée en STAPS à l’Université de Bretagne Occidentale, membre du laboratoire d’Économie de l’Ouest et chercheuse associée au LACES (EA7437). En 2020, elle soutient sa thèse intitulée « La place et le rôle des femmes dans la gouvernance des fédérations sportives françaises ». Ses travaux portent sur le rôle de l’action publique sur les inégalités et les discriminations s’exprimant dans le domaine sportif. En répondant aux questions de Pauline Déodati, Annabelle revient notamment sur sa place en tant que femme, sportive et dirigeante. Sans se positionner entre atout et obstacle, la chercheuse aborde les difficultés comme les facilités que sa position a engendré sur son travail de recherche. Son retour sur son parcours doctoral alimenté par ses nouveaux projets, éclaire sur les étapes de la réflexivité du jeune chercheur.
Marie Kergoat
Marie Kergoat est doctorante contractuelle à l’université d’Artois (Laboratoire Texte et Cultures – UR 4028) et chargée de cours à l’université Rennes II. Sa thèse, « Un patrimoine au prisme de l’imaginaire – L’escrime de fantasy, représentations et pratiques », est menée sous la direction d’Anne Besson et Nathalie Gauthard, en Littérature générale et comparée et Arts du spectacle, et porte sur un corpus la menant à explorer le continent de la fantasy au cœur d’une enquête sur la place de l’escrime au sein de ce genre littéraire. Ses champs de recherche recoupent la fantasy sous toutes ses formes, et plus généralement ses jeux, tensions et contraintes de narration ainsi que de création, s’attachant à adopter une perspective transmédiatique et transdisciplinaire. Dans le cadre de ce travail, elle s’est lancée dans l’écriture de l’histoire de l’escrime artistique. En répondant aux questions de Nicolas Voisin, Marie revient sur les enjeux et les difficultés relatives à la recomposition de l’histoire de cette discipline ancrée dans le domaine de l’imaginaire historique et pour laquelle il semble parfois exister différents récits à propos d’un même élément fondateur de la pratique. Surtout, elle interroge son statut de pratiquante aguerrie et expérimentée, ayant découvert la discipline il y a sept ans de cela.
Lucas Firtz
Lucas Firtz s’inscrit à la fois en sciences de l’information et de la communication et en sociologie à l’Université Paris Nanterre et à l’EHESS. Il est aussi ATER à l’Université Gustave Eiffel. Ses travaux s’intéressent à la communication numérique et à l’interaction de face-à-face dans la formation des mouvements sociaux de la neurodiversité. Il cherche à identifier le rôle de ces dispositifs dans la prise de parole des personnes neuroatypiques, dans leur mobilisation et dans l’articulation des communautés de savoir autour de l’autisme et de la neurodiversité. Il soutient une thèse de doctorat le 12 février 2025 intitulée « Matérialité, accessibilité, friction : une analyse des dispositifs sociotechniques autour de l’autisme et de la neurodiversité. ». Lors de ces journées d’études Lucas Firtz avait plus particulièrement questionné les normes d’accessibilité de l’entretien pour ensuite dévoiler la manière dont l’approche crip propre aux technosciences permettait d’exploiter les frictions d’accès comme un élément de connaissance. Lucas Fritz répond aux questions de Sacha Thiébaud pour revenir sur la position de la subjectivité dans le cadre de sa thèse. Lucas considère la présence d’une part subjective dans la recherche comme inévitable et conseille de s’y confronter plutôt que de l’éviter. Il revient sur les controverses qu’elle suscite et s’appuie sur l’apport de la philosophie pour la resituer dans la démarche de recherche. Il aborde la manière dont son terrain a pu l’influencer, notamment par ces multiples engagements dans des organisations et communautés dans lesquelles il est encore actif aujourd’hui. Transparaissent enfin, les enjeux réflexifs d’un engagement face au rapport de domination autour du handicap permanent et préalable à la thèse. Pour information, Lucas a un site internet sur lequel il répertorie son travail : lucasaloyse.com
Jade Aramburu
Jade Aramburu est doctorante en sociologie-démographie à l’Université de Rouen Normandie, au sein du laboratoire des dynamiques sociales (UR 7476). Sa thèse, commencée en novembre 2022, s’intitule « La formation hôtelière contemporaine ». En parallèle de son projet de recherche, elle travaille en tant qu’assistance d’éducation dans l’école hôtelière où elle mène son enquête. Son travail de thèse porte sur la description de la socialisation professionnelle des métiers de l’hôtellerie et de la restauration. Jade s’intéresse notamment au processus à travers lequel les individus apprennent un métier sur plusieurs plans : les compétences, les comportements, les normes et les valeurs associées à ce secteur professionnel, le tout sera analysé au prisme du genre et de classe. Au détour d’un échange avec Hugo Meras Serrano, Jade revient notamment sur son rôle d’assistance d’éducation au sein de l’école hôtelière où elle enquête. Sa position lui permet un accès privilégié aux dynamiques sociales qu’elle analyse. Mais ce rôle engagé brouille aussi les frontières entre distance analytique et proximité affective. Cela l’amène à adopter une posture réflexive sur sa propre subjectivité.
Philémon Marcel-Millet
Philémon Marcel-Millet est chercheur à l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées (IRBA), au sein de l’unité Physiologie de l’Exercice et des Activités en Conditions Extrêmes. Il est également membre du Laboratoire de Biologie de l’Exercice pour la Performance et la Santé (LBEPS) et travaille sur la thermorégulation dans le cadre du coup de chaleur d’exercice en milieu militaire. En répondant aux questions de Yanis Ansri, Philémon revient sur son expérience de chercheur et explique comment la manière de collecter et de traiter les données peut grandement influencer les résultats. Il s’est alors interrogé : « Est-ce que j’écris le réel ou est-ce que j’écris selon mon point de vue ? » Initialement perçu comme un obstacle, ce questionnement sur la subjectivité lui a permis d’explorer de nouvelles facettes de la recherche en sciences de la vie.
Johanna Mathiot
Johanna Mathiot est doctorante au laboratoire INSERM – CAPS (Cognition-Action-Plasticité Sensorimotrice). Ses travaux de thèse portent sur les effets de l’heure de la journée sur l’interdépendance des apprentissages moteurs et cognitifs, en explorant plus particulièrement leurs aspects comportementaux et neurophysiologiques. En répondant aux questions de Camille Chevalier et de Yanis Ansri, Johanna affirme avoir été confrontée très tôt à la subjectivité. Selon elle, une simple consigne formulée différemment peut directement influencer les résultats. Elle a ainsi perdu un grand nombre de données en raison d’une méthode de recueil insuffisamment standardisée. D’abord perçu comme un obstacle, ce questionnement autour de la subjectivité a finalement permis, selon Johanna, d’améliorer la qualité de sa recherche scientifique.
Maude Noel
Maude Noel est docteure en STAPS affiliée au laboratoire Santésih de l’Université de Montpellier. En 2024, elle soutient sa thèse intitulée : « Approche sociologique de l’usage du numérique dans les ateliers de prévention pour la santé par l’activité physique auprès des personnes âgées ». Ses travaux s’inscrivent dans les champs de la sociologie du vieillissement, de la prévention et de l’activité physique. Depuis 5 ans, Maude occupe également le poste de responsable de missions au sein du Pôle d’études et d’évaluations de la Mutualité Française Bourgogne-Franche-Comté. Dans ce podcast, elle revient sur son expérience singulière de doctorante CIFRE et son double statut : celui de salariée et de doctorante. Elle décrit sa posture particulière sans pour autant prendre position sur la question de la subjectivité comme atout ou obstacle. Elle explore les multiples facettes de cette subjectivité dans son terrain et souligne l’importance d’en avoir conscience et de la prendre en compte.